Pourquoi je ne suis pas (encore) abonné à Prescrire

Ce post n’est pas une auto-défense (l’abonnement à Prescrire n’est pas une obligation à l’heure où je vous parle) mais une justification vis-à-vis de moi-même ; c’est presque un entretien motivationnel pour plus tard.

Ce n’est pas non plus une propagande pro ou anti-Prescrire. Mettons les choses au clair : j’apprécie énormément mes maîtres de stage et la plupart de mes amis twittos médecins abonnés à cette revue indépendante médicale. Il m’est arrivé à plusieurs reprises d’aller consulter la revue pour des questions pharmacologiques, et de la référencer dans une bibliographie. Elle a le double mérite de faire une recherche de littérature sur énormément de médicaments (que nous n’aurions pas le temps ou la capacité de faire seul) et d’avoir des avis souvent clairs et tranchés. Si je devais choisir un camp manichéen, je serais clairement dans le camp pro-Prescrire. Ne l’oubliez pas en lisant la suite.

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Maladie de Dercum

Une patiente était suivie depuis 4 ans en médecine interne pour une fibromyalgie (douleurs diffuses, dont le terrain de prédilection est la femme de quarante ans anxieuse pour être totalement caricatural) et depuis une dizaine d’années en dermatologie, pour un problème de lipomes multiples et récidivants (des boules de graisses sous la peau si vous voulez).

A plusieurs reprises, les dermatologues se posaient la question d’une neurofibromatose (avec des boules palpables aussi sous la peau donc voilà…) et pour se rassurer, ils ont réalisé à chaque fois des biopsies qui répondaient : lipome. On note également qu’une fois, elle a présenté une ecchymose spontanée, pour laquelle elle a immédiatement consulté son dermatologue qui a conclu que c’était vraiment bizarre.

Et donc la patiente nous est adressée en hospitalisation pour… Elimination définitive d’une éventuelle neurofibromatose. (en vrai c’était « Suspicion de neurofibromatose », mais officieusement…)

J’examine cette patiente, c’est la fin d’après-midi, je reprends le dossier et les 10 ans d’archive du CHRU (par chance je n’ai pas les 10 ans de consultation chez son médecin traitant…) et j’en conclus après 1h30 d’épluchage : lipomes multiples et récidivants, et douloureux. Voilà, on va faire le gros bilan qui était prévu à l’entrée (médecine interne oblige) et on verra bien, mais quand j’en parle à ma chef, la question est « pffff tout a été fait, qu’est-ce qu’on va demander comme examen qui soit réellement utile ? »

La patiente reste hospitalisée la nuit (quand même), et le lendemain, sur le chemin en voiture jusqu’au métro (conduit par ma copine, si vous êtes de la police je n’utilisais pas mon iPhone en roulant, merci), je regarde sur l’excellent site Orphanet par curiosité s’il n’y aurait pas une maladie associant des lipomes, une ecchymose spontanée et des douleurs.

Et bien si. La lipomatose douloureuse, ou maladie de Dercum.

Ca a bien fait rire mes chefs le matin quand j’ai proposé ce diagnostic venu de l’espace, auquel ils ont immédiatement adhéré (vu que c’était une description totalement typique…). Comme on ne savait pas trop quoi en faire, on a expliqué un peu le tableau à la patiente et botté vers la spécialiste en lipomatose du CHU.

Et comme personne n’avait jamais entendu parlé de cette pathologie, j’ai eu l’occasion de faire un powerpoint de présentation pour le topo hebdomadaire… que je vous soumets ici 😉

De cette anecdote, je retiens quand même une chose (que j’ai eu mille fois l’occasion de voir dans ce stage assez incroyable), qui est essentielle en médecine générale : ce n’est pas parce qu’on ne connait pas que ça n’existe pas !

Lipomatose douloureuse - Maladie de Dercum (5619 téléchargements )

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Quel anti-émétique choisir en médecine ambulatoire pour une gastroentérite ?

Chez l’enfant, les vomissements sont stressants pour les parents, une cause de déshydratation et une cause d’échec du SRO (Soluté de Réhydratation Orale). Chez l’adulte, nausées et vomissements sont surtout gênants.

Il y a peu de preuve d’efficacité des antiémétiques dans le cadre d’une gastro-entérite aiguë, les symptômes s’amendant souvent spontanément en 24-48 heures.

Les antiémétiques les plus étudiés outre-Atlantique sont les anti-H1 de première génération, qui présentent l’inconvénient d’être sédatifs. Ils sont peu utilisés actuellement en France.

Les prokinétiques (métoclopramide PRIMPERAN, dompéridone MOTILIUM, métopimazine VOGALENE) sont les plus prescrits dans nos contrées. Ce sont des neuroleptiques cachés, pouvant rarement occasionner un syndrome extrapyramidal (surtout PRIMPERAN) ou une augmentation de l’espace QT (surtout MOTILIUM ?). L’augmentation de l’espace QT est un effet de classe connu des neuroleptiques ; il est donc probable que le dompéridone ne soit pas le seul responsable d’un tel effet, et il semble raisonnable de contre-indiquer les prokinétiques pour tout patient sous neuroleptique ou présentant un antécédent de QT long.

Le métopimazine VOGALENE est le prokinétique pour lequel le moins d’effets indésirables ont été décrits ; toutefois, son efficacité n’est pas démontrée…

En dehors d’un terrain à risque (personne âgée, insuffisant rénal…), l’attitude la plus raisonnable est donc d’attendre que les nausées cèdent, en réhydratant et resucrant (soluté de réhydratation orale chez l’enfant, eau ou coca ou ce-qu-il-veut chez l’adulte). En cas de gêne majeure, bien que son efficacité ne soit pas démontrée, la métopimazine VOGALENE est le prokinétique et l’antiémétique semblant avoir le meilleur profil de tolérance à l’heure actuelle.

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Ils en ont dit…

Actuellement, la mode des commentaires sur les affiches de cinéma est à la concision…

Ainsi, vous pouvez produire une bouse, il vous suffit de savoir extraire l’information pour que votre film devienne le « chouchou des critiques ».

Ca donne souvent :

« Incroyable ! » (Le Monde)*

« Sublime ! » (Euro News)**

« A couper le souffle » (Tytytpei Mägäzin)***

* « Je n’avais jamais vu autant de personnes quitter la salle dans le premier quart d’heure : incroyable ! »

** « Je ne retiendrai qu’une seule chose de ce film, c’est le générique de fin qui apparait comme une libération sublime ! »

*** « Tatjmö Uyustï moöön guylr : A couper le souffle, ijjk öjmon Pöke Pökeji »

Cette mode est grotesque. Il faut passer outre. C’est pourquoi aujourd’hui je vous propose un recueil des meilleurs commentaires intégraux à propos de mon site – je vous demanderai d’être indulgent quant à la syntaxe et l’orthographe de mes lecteurs internationaux, qui n’ont pas tous le France comme maternelle language :

« mimiryudo.free.fr est merveilleux. Il ya toujours toutes les infos idéale dans les idées de mes doigts. Merci et continuez votre excellent travail! » (France Call Girls)

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[FMC] Interpréter une spirométrie

J’ouvre cette nouvelle catégorie « Cours et topos » avec le powerpoint que je vais présenter mardi sur la spirométrie au sein de mon Unité Pédagogique Locale (3 médecins généralistes dans un cabinet, si vous préférez), où ils vont acquérir très bientôt une spirométrie.

Il s’agit de rappels plus ou moins poussés sur les explorations fonctionnelles respiratoires, la spirométrie, la courbe débit-volume.

Vous me voyez désolé de l’absence de références claires, je n’ai pas tout fait sur mon PC et donc pas pu utiliser Zotero ; globalement, beaucoup d’informations viennent des travaux sur la « standardisation des explorations fonctionnelles respiratoires » du groupe de travail ATS/ERS, du site respir.com, de l’excellent (et simple) document « Comment interpréter une EFR ? » par le Dr. Marie-Laure Simon-Rigaud du CHU de Besançon, et d’autres sources encore que je n’ai malheureusement pas noté.

En espérant que cela vous sera utile 😉

Interpréter une spirométrie (ppt) (11263 téléchargements ) (dernière mise à jour le 16 mai 2013*)

*Merci à @totomathon et @PhilAllergie pour leurs avis éclairés ! 🙂

[EDIT du 3 janvier 2019]

Entre temps, je suis installé depuis 2015 et j’ai un spiromètre depuis février 2018 (le SpiroBank II, très bien !). Je me remets à jour sur ma façon de faire des spiromètres, en explorant plus en profondeur le logiciel WinSpiro.

Même si c’est déjà dans la présentation, rappelons que le spiromètre n’est pas un pléthysmographe : il ne donne pas accès au volume résiduel, mais seulement aux 3 autres volumes : courant, réserve inspiratoire, réserve expiratoire (les capacités sont des additions de volume : capacité vitale = somme des 3 ; capacité pulmonaire totale = somme des 4). Il ne donne donc pas non plus accès aux syndromes mixtes et restrictifs, mais peut les suspecter.

Le site spirometrie.fr est assez bien fait pour illustrer le logiciel WinSpiro (utilisé avec le SpiroBank). La notice peut également être consultée en français via le logiciel (elle n’est pas très détaillée sur les tests).

@totomathon a aussi fait 2 billets de blog très bien : ici et .

Quelques indications simples :

Avant le test :

  • Pas de repas lourd 2 heures avant l’examen
  • Pas de tabac 1 heure avant l’examen
  • Pas d’alcool 4 heures avant l’examen
  • Pas d’exercice physique intense 30 minutes avant l’examen
  • Pas de bronchodilatateur inhalé de courte durée d’action 6 heures avant l’examen, arrêt 12 heures avant l’examen pour ceux à longue durée d’action
  • Pas d’habit trop serré
  • Pas d’examen à moins d’un mois d’un infarctus du myocarde

Pendant le test :

  • Patient en position assise en général (peut être debout, le préciser pour la reproductibilité à chaque mesure)
  • Capacité vitale lente (CVL) : si on la fait, plutôt avant la CVF pour éviter la fatigue :
    • 1. Inspiration et expiration normale dans le spiromètre
    • 2. Inspiration lente complète
    • 3. puis Expiration lente complète
    • 4. répété plusieurs fois
  • Capacité vitale forcée (CVF) :
    • 1. Inspiration maximale
    • 2. Expiration dans le spiromètre : nez bouché, bouche étanche, expiration d’emblée maximale, le plus fort et le plus longtemps possible
    • 3. Inspiration profonde, l’embout toujours en bouche

Analyse : 

  • Toujours commencer par regarder les courbes bien sûr (reproductibilité, fiabilité de l’examen, diagnostic en un coup d’oeil…)
  • On peut diagnostiquer uniquement une obstruction avec le spiromètre (« courbe concave ») ; la restriction implique d’avoir la CPT et donc le volume résiduel… et donc une pléthysmographie.
  • On peut néanmoins suspecter la restriction devant une diminution conjointe de VEMS et de CVF (« un modèle réduit de la courbe débit-volume, avec les mêmes pentes »).
  • Le diagnostic du syndrome obstructif repose sur :
    • Critères de Gold en France : VEMS / CVF < 70 %, retenu par la classification de GOLD (le vrai rapport de Tiffeneau = VEMS / CVL, quand on a pris le temps de mesurer la CVL)
      • Attention, le logiciel présente le rapport VEMS/CV(L) si la CV a été mesurée, sinon VEMS/CVF ; attention, la CVF intègre la compression dynamique des bronches et peut être < ou = à CVL (si elle est supérieure, l’examen est de mauvaise qualité). En cas d’obstruction distale, CVF < CVL.
      • Attention, ce n’est pas 70 % par rapport à la valeur prédite, mais bien 70 % pour le rapport (VEMS 4l et CVF 5l = rapport à 80 %).
      • … la limite, c’est que le Tiffeneau dépend de l’âge, de la taille et du sexe (avoir un Tiffeneau < 70 % à 80 ans est normal, le poumon vieillit)
    • D’autres critères existent : VEMS/CVF < 88 % du rapport prédit (que retient également @totomathon ici), VEMS/CVF < 5ème percentile prédit pour l’âge…
  • La BPCO peut évoluer vers une diminution de la capacité vitale, et une augmentation du volume résiduel (distension thoracique : VR > 135 % théorique, VR/CPT augmenté). D’où l’intérêt, lors du diagnostic d’une BPCO, d’avoir une estimation du VR et donc une pléthysmographie… et donc un avis pneumologie.
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