Une correction de cas clinique (ECN Blanches Hippocrate mars 2012, dossier 4)

Une fois n’est pas coutume, je ne vais ni raconter mes palpitantes aventures d’étudiant en médecine, ni vous proposer un cas clinique personnel.

Ayant été refusé en tant que conférencier (en septembre sur l’envoi d’un cas clinique, d’une lettre de motivation et d’un CV avec le classement aux ECN), une responsable pédagogique m’a proposé de participer à la surveillance et à la correction des ECN blanches du 17 mars 2012. J’ai accepté.

En ce qui concerne la surveillance, il s’agissait plutôt de préparer la salle, distribuer les copies et faire acte de présence en cas de besoin, avec trois autres internes. De toute façon, à quoi bon tricher lors d’un examen blanc pour lequel on a payé ? Du coup, pendant les trois heures, quand je n’étais pas sur mon iPhone ou à chercher (désespérément) une main se levant dans l’amphithéâtre pour quémander mon aide et/ou une feuille de brouillon, je me suis amusé à faire les six premiers dossiers rapidement.

Ensuite, nous nous sommes répartis les dossiers (3 correcteurs par dossier, 260 participants à Lille, donc 87 dossiers environ). J’ai volontairement pris le quatrième dossier. Ce n’est pas celui que j’aurais le moins réussi (fait vite fait, j’ai 52 contre seulement 36 pour le dossier 6), mais le diagnostic ne m’était pas immédiatement apparu comme une évidence et la correction m’a paru assez intéressante à commenter.

Je vais donc vous proposer une pseudo-séance de tutorat sur la correction du dossier 4 des ECN Blanches de la Conférence Hippocrate de mars 2012. Je vais vous faire un rappel du cas, un bilan des automatismes que j’ai pu relever, essayer de vous donner quelques astuces pour éviter de perdre bêtement des points et enfin, faire un petit point personnel sur le dossier et la correction proposée. C’est un travail sans prétention : il ne s’agit pas du tout de critiquer le cas clinique, ou de me moquer du travail qui m’a été donné de corriger (même si je citerai parfois des erreurs amusantes).
Globalement, les copies sont souvent de très bonne qualité (tout le monde pense aux mêmes choses).

Mon but est donc de vous inviter à mes côtés, fraîchement assis dans le train ou sur un bord de lit, lors de cette correction d’un grand nombre de copies. En espérant que le recul pris vous aidera pour les futurs dossiers…

Tout ce qui suit va comporter des SPOILERS sur le cas, et si vous souhaitez faire le dossier avant, arrêtez ici votre lecture !

Vous poursuivez ?

Bien.

Sur mes 90 copies lilloises, la moyenne du dossier 4 est de 50,01 (écart-type 12,23), la médiane est de 50,5 avec des extrêmes à 19 et 73. On a donc une très belle répartition symétrique, peu étalée, avec des notes qui suivent une loi normale centrée sur 50… En d’autres termes, un dossier peu discriminant (de façon individuelle, il peut l’être beaucoup plus bien sûr…)

En attendant que le dossier soit disponible sur le site de la Conférence Hippocrate (peut-être un jour), voici un résumé épuré de l’énoncé. Passez-le si vous avez déjà fait le cas…

  • Pédiatre en ville, vous voyez Jeanne, 23 mois, 11.5 kg et 83 cm.
  • Elle et ses deux frères n’ont aucun antécédent, leurs vaccins sont à jour, ils fréquentent les collectivités.
  • Depuis 48 heures, Jeanne présente des diarrhées très liquides, une fièvre à 38,5°C, pas de vomissements.
  • Son frère et son père ont présenté une gastro-entérite aiguë il y a deux jours, et sont aujourd’hui asymptomatiques.

Question 1 : Son examen est rassurant. Quelles sont vos prescriptions avec la surveillance ?

  • Elle revient le lendemain vous voir (en ville).
  • Vomissements après chaque boisson, refus d’alimentation, selles rouille/verte/noire, fièvre à 38°C
  • Bon état général, poids 10 kg, FC 100 bpm, TA 90/60, abdomen ballonné, reflet ictérique, pâleur

Question 2 : Antibiothérapie ? Justifier.

  • Vous l’adressez aux urgences.
  • 9,5 kg, pâle, fatigue, T 38°c, TA 100/60, FC 125, TRC < 3 secondes, abdomen météorisé et sensible, ictère discret

Question 3 : a/ Diagnostic ? b/ Cause la plus fréquente dans sa forme typique ?

  • Bilan: NFS (Hb 9,5 g/dl, plaquettes 70 G/l, GB 15 900 dont 8 700 PNN), CRP (23), créatininémie 120 µmol/l, Na 136 mmol/l, K 3,8 mmol/l

Question 4 : Compléter le bilan.

Question 5 : Principes de la prise en charge avec la surveillance.

  • A J4, diurèse de 0,5 ml/kg/h, créatinine 313 µmol/l, Hb 6,5 g/dl, plaquettes 43 G/l, Na 122 mmol/l, K 4,5 mmol/l

Question 6 : a/ Diagnostic ? b/ Traitement ?

  • Le lendemain, convulsion de 10 minutes avec déviation de la tête et des yeux à gauche, flexion de l’hémicorps droit, clonies bilatérales.

Question 7 : a/ Causes possibles ? b/ Principes de traitement ?

Question 8 : Grands principes de l’enquête épidémiologique ?

 

Tout d’abord, un petit mot sur la forme. A la volée, environ 10% des copies sont vraiment brouillonnes, les autres étant tout à fait correctes, voire même parfois jolies. Sur 90 copies, une seule mettait tout à la ligne sans tiret ou alinéa, et c’était pénible à lire. Donc alinéas et tirets, c’est agréable et presque tout le monde le fait… donc faites-le !

Je ne dirai rien sur l’écriture parce que la mienne n’est pas des plus agréables à l’œil. Toutefois, je recommanderais volontiers d’écrire assez petit (lisible quand même), parce que la recherche des idées-clés est quelque chose de très visuel et quand toutes les réponses sont sur deux pages avec des mots de trois centimètres de hauteur, ça fatigue les yeux de faire des allers-retours. Le risque d’oublier un mot-clé en route est grand.

Enfin, de la même façon, mettez les idées principales en tête. J’ai passé de moins en moins de temps au fil des copies, à force de savoir par cœur ce que je recherchais. J’y ai quand même passé 3-4 minutes à chaque fois, et ai parfois déniché (le mot est très juste) des idées-clés bien cachées. Je pense notamment à la copie qui mettait « mise en condition : scope cardio-tensionnel » en toute dernière ligne de la question 5, après la surveillance et le traitement (petit bémol : parfois, certains conférenciers vous diront que la mise en condition, c’est évident et que ça ne sert à rien d’en mettre des tonnes… le jour des ECN couvrez-vous quand même, et si vous faites des paragraphes clairs avec des alinéas, ça facilite la vie du correcteur). C’est difficile, mais ça vaut la peine : j’ai probablement raté des mots-clés, qui n’étaient pas mis en évidence (ça sera pareil en vrai). Soyez le médecin du cas, pas un étudiant devant sa copie (le scope, on le met à l’arrivée…)

Ah, et n’oubliez pas des parties de question, comme le « Justifier » de la question 2, ou la question 7b sur le traitement de la crise d’épilepsie…

Passons maintenant au fond, question par question.

 

La question 1 est une question qui présente un grand intérêt pratique, car relevant d’une situation courante. Avec le dossier de pédiatrie des Epreuves Classantes Nationales 2011, nous avons pu constater que les situations fréquentes tiennent à cœur les rédacteurs de dossier… Donc dans la prise en charge d’une diarrhée de l’enfant, soyez systématique au moins sur les points suivants : en ambulatoire/en hospitalisation, réhydratation par SRO, alimentation, surveillance du poids (et éviction scolaire pourquoi pas).

Les oublis et erreurs les plus fréquentes sont :

  • « en ambulatoire » : mais ce n’est pas vraiment la faute de l’étudiant, plutôt la faute du rédacteur du cas. En ambulatoire ne répond pas directement à la question « quelles sont vos prescriptions » et 10-15% ont oublié de l’écrire – alors qu’ils parlaient ensuite de consignes de reconsultation -, au profit d’une véritable présentation d’ordonnance (nom du médecin, nom de l’enfant / âge / poids…) Au final, ça aurait été plus pertinent et discriminant de coter ces spécificités d’une ordonnance pédiatrique.
    A noter une copie qui conseillait de « garder aux urgences quelques heures », sans lire les trois premiers mots de l’énoncé « Pédiatre en ville »… (soyez le médecin du cas, disais-je ;-))
  • parler de l’alimentation : là, l’oubli concerne 30-40% des copies. Ensuite, dans ceux qui en parlent, on a souvent la phrase-type « reprise d’une alimentation précoce entre H4 et H6 », qui n’est pas mal. En pratique, le plus important me semble être de proposer de poursuivre une alimentation adaptée (riz, carotte… on va éviter les fricadelles dans le nord, ou la choucroute en Alsace). Ca ne sert pas à grand-chose d’attendre 4 à 6 heures, surtout quand Jeanne a déjà des diarrhées depuis 48 heures.
    A noter un amusant « si diversification alimentaire, poursuite de l’alimentation » (à 23 mois, ça serait quand même dommage qu’elle ne boive que du lait ;-))
  • toutes les consignes du SRO : quand j’ai fait le cas à la volée, je n’en avais pas parlé du tout… preuve que les bonnes habitudes partent vite ! Un seul a fait comme moi, et il a eu 55/100 tout de même. Globalement, ce qui est oublié c’est « 1 sachet dans 200 ml » et « à volonté » (environ 20% oublient l’un des mots clés cotés). La plupart ont bien compris que c’était à volonté tant que diarrhée (et pas « SRO 2-3 par jour » ou « SRO QSP 4 jours »), avec un sachet reconstitué dans 200 ml d’eau (et non pas un sachet dans 20 ou dans 250ml, ou encore « SRO 30 ml dans 200 ml d’eau »).
    Essayez de rester simple, ce sont des consignes pour les parents, et tous ne sont pas musiciens ou latinistes avertis : même si je l’ai coté, « ad libidum » pourrait très bien être refusé par d’autres.
  • Presque tous les candidats mettent du racécadotril TIORFAN et du paracétamol. Les conférenciers et professeurs le répètent régulièrement, et je vais le faire ici aussi à mon tour : ne vous embarquez pas dans des prescriptions foireuses, qui laisseront une mauvaise image de votre réponse, comme par exemple « 1 biberon ou 1 SRO au coucher en plus », « antipyrétique à la demande si température > 38,5°C » (allô, ma fille est toute jaune, j’ai donné 43 cuillers-mesures de paracétamol aujourd’hui), « paracétamol 30 mg/kg/j en 4 prises » (au lieu de 60), « Spasfon » (sans limite d’âge, mais a-t-elle des douleurs ici ?), « dompéridone IV, tiorfan IV » (en ambulatoire !), « CI aux ralentisseurs du transit » (ouais et au PRIMPERAN aussi, etc)…
  • De même, épargnez un peu votre encre et ne noyez pas vos mots-clés (difficiles à trouver d’ailleurs dans cette question). A quoi bon écrire ici « soutien psychologique des parents » ou « avec consentement parental aux soins », puisqu’ils l’ont amené pour une gastro ? « Arrêt du tabagisme passif », même si ça part d’une bonne intention, ne sera pas coté à cette question et celui qui l’a écrit en était sûrement aussi persuadé.
  • La partie surveillance aurait dû maîtrisée par tout le monde, avec juste un peu de méthodologie. En effet, l’énoncé qui suit dit : « elle revient le lendemain (…) vomissements (…) refus d’alimentation (…) selles rouilles (…) fièvre (…) bon état général (…) poids (…) pâleur », soit 5 des 7 mots clés, dont 3 suffisaient pour prendre les 4 points ! 20 des 90 copies n’ont pas eu ces 4 points. C’est dommage de rester vague avec « surveillance de l’efficacité et de la tolérance », « signes de déshydratation (plus ou moins détaillés) », « comportement », ou d’être complètement à côté de la réalité en proposant une surveillance ambulatoire du « poids, de la taille (?), du périmètre abdominal, du périmètre crânien, de la fréquence cardiaque, de la tension artérielle (?), de la diurèse, de la SaO2 (???), le TRC, le pli cutané (tous les parents ne savent pas ce que c’est) »… A côté de ça, félicitations à ceux qui ont pensé à prescrire un pèse-bébé, ou même une désinfection rhino-pharyngée (un encombrement nasal est souvent associé dans le cadre de ces viroses).
  • Enfin, soyez systématiques mais pas non plus robotiques. On demande « avec la surveillance », répondez poliment au monsieur. Plus de 50% des copies répondent « information et éducation parentale : déshydratation, poids, alimentation… » puis « reconsultation en urgence si refus d’alimentation, déshydratation, perte de poids », puis parfois « contrôle à 48h non systématique », puis « ah tiens, j’ai pas écrit surveillance alors que c’est la question, bon bah surveillance : poids, vomissements… » Ça m’a tellement surpris que je suppose que les étudiants lillois ont eu un cas clinique récemment qui imposait ce plan, à moins que ça ne soit au Sanofi. Essayez d’adapter vos connaissances au cas, et pas l’inverse, ça fera plaisir au correcteur qui ne sait plus où piocher (NB : quand je dis 20 copies sur 90 n’ont pas eu les 4 points, sachez que j’ai compté les mots clés, qu’ils soient dans la catégorie surveillance ou éducation parental ou reconsultation en urgence)

 

La question 2 est plus simple à commenter. Le plus rarement mis était l’immunodépression – pour autant, ce ne sont pas forcément les meilleures notes finales, vu que ce n’est qu’un point (non discriminant). Il comportait deux pièges, a posteriori :

  • Pas mal d’étudiants ont mis avec brio « non, pas d’antibiothérapie car je suspecte un syndrome hémolytique et urémique et ça risque de libérer des toxines », et n’ont récolté que 2 points sur 5, aveuglés d’avoir cru briller (je vous parlerai bientôt du dossier de dermatologie aux ECN 2011 où je croyais mettre tout le monde sur la paille – grâce à mon stage en dermato au CHU, très formateur administrativement – et dans lequel j’avais écrit « methotrexate possible en 1ère ligne chez ce patient, qui présente un score d’extension PASI faible mais un score de qualité de vie DLQI élevé compte tenu de sa profession de commercial, sous réserve d’acceptation par le patient et après bilan pré-thérapeutique… », qui a dû me coûter une bonne quinzaine de points et au moins 600 places).
  • la justification posait problème. Beaucoup se sont contentés de dire que c’était « probablement viral ». Quand il s’agit d’un diagnostic, tout le monde dégaine son moyen mnémotechnique TAFACPD (Terrain, Antécédents, Fréquence, Anamnèse, Clinique, Paraclinique, Différentiel) et tout le monde pense à parler du terrain et à utiliser tout l’énoncé (aucun antécédent, suivi depuis toujours, et même la famille n’a pas d’antécédent…) Là, il s’agit de parler d’une proposition thérapeutique, donc on essaie de penser « est-ce indiqué ? est-ce contre-indiqué ? y a-t-il un bilan à faire avant ? y a-t-il des effets indésirables ? que faudra-t-il surveiller ? » et certains s’en sont sortis en ressortant les indications de coproculture/antibiothérapie en cas de de diarrhée (syndrome dysentérique ou diarrhée glairo-sanglante, retour de voyage tropical, terrain vulnérable, syndrome septicémique, nosocomiale ou post-antibiothérapie)

A noter que de nombreux étudiants ont répondu « oui mais après prélèvements » et d’autres « non, après prélèvements ». Le rédacteur du cas n’attendait certainement un « oui mais » dans cette question, donc soyons logique et contentons-nous de mettre « non », même si on n’a aucune idée de la réponse… (surtout que « vous l’adressez aux urgences pédiatriques… », donc si c’est une urgence, ça ne sert à rien de mettre un traitement probabiliste à aller chercher à la pharmacie avant, non ?)

28 des 90 copies (31,1%) ont écrit OUI à cette question. La moyenne de ces copies est de 46,25 +/- 10,96, c’est donc inférieur à la moyenne (mais de façon statistiquement non significative).
J’ai été amusé par celle qui a écrit « on n’antibiose que si… », en me disant qu’un jour elle me transmettra peut-être des informations à 8h30 du style « j’ai lasilixé un OAP et augmentiné une sinusite qui chauffait cette nuit ».

 

La question 3 est un peu le pivot du cas clinique, je vais donc y passer du temps. Vous pouvez prendre un chocolat chaud, et revenir.

J’ai vu des diagnostics farfelus (en même temps que je reviendrai sur la dermatologie, peut-être vous parlerai-je dans un prochain billet de mon « arrêt cardio-respiratoire compliquant un syndrome coronarien aigu antérieur par embolisation de l’artère coronaire gauche au cours d’une fibrillation auriculaire » au dossier 7 des ECN 2011, avant que la voie de la raison ne m’oriente vers le bon diagnostic, que je ne spoilerai ni ne lasilixerai ici…) :

  • « Echec thérapeutique d’une suspicion de GEA virale : syndrome occlusif aigu grêlique probable par strangulation compliquant une probable invagination intestinale aiguë probablement secondaire à un SHU (réponse à la question 3b : sa forme typique est la forme primaire iléocaecale (iléocolique)) ».
    Je lui ai mis les 5 points pour le SHU
    (notamment parce que c’est le seul à avoir pensé aux anticorps anti-LPS, mais il n’a eu « que » 48, à cause de la question 6 où il a remis le même diagnostic sans parler d’insuffisance rénale), mais il ne faut pas mettre des probables, des peut-être, des plus ou moins…
  • « Choc hypovolémique sur déshydratation extracellulaire sur sepsis sévère sur diarrhée bactérienne responsable d’un SHU sur TIAC ».
    En citant le SHU, ce petit malin remporte la mise de 5 points et prend du coup le wagon de tête (cf. les chiffres en fin de paragraphe).
  • « Invagination intestinale aiguë et perforation sur hémorragie digestive (type iléo-caecal aussi) » ; « invagination intestinale aiguë secondaire à un SHU »…
    Pas mal, mais là, l’abdomen est ballonné puis météorisé, mais ce n’est pas des signes typiques d’invagination : pour ce diagnostic d’invagination intestinale aiguë qui en a taraudé plus d’un, retenez surtout la douleur associée à la pâleur lors de l’invagination, « intense/inoubliable pour les parents, à début et fin brutaux, avec calme intercritique entre les paroxysmes douloureux » (les cris, le refus d’alimentation, c’est bien aussi, mais c’est moins typique).
  • « Déshydratation extracellulaire par diarrhée et intolérance alimentaire compliquant une occlusion intestinale par infection à Streptocoque bêta-hémolytique » ; ou « surinfection bactérienne de GEA à Straphycoccus aureus ». Puis tous les deux parlent de SHU à la question 6 (donc d’infection à Escherichia coli).
    Même si c’est tentant parfois de jouer sur tous les tableaux quand on doute, essayez d’être cohérent entre les réponses, la jeune Jeanne ne peut pas être infectée par toutes les bactéries du monde en même temps.
  • « Instabilité hémodynamique sur GEA bactérienne à Yersinia enterocolitica » (pourquoi Yersinia ?),
  • « GEA avec déshydratation sévère et prise orale impossible » (ça fait un peu concierge)

Beaucoup ont parlé de choc, j’ai même eu quelqu’un qui m’a dit « perte de poids de 15% donc choc ». Je n’ai pas trouvé de données qui confirmaient cela, si vous en avez, je suis preneur.
Un choc, c’est clinique. Là, Jeanne est pâle et fatiguée, son examen est normal (pas de pouls filant, de marbrures…), avec pour constantes TA 100/60, FC 125 (le premier signe de choc chez l’enfant est la tachycardie, l’hypotension est tardive), TRC < 3 secondes.
Chez un enfant entre 1 et 10 ans, la TA systolique normale est de « 90 + 2 x âge (années) », et on parle d’hypotension sous « 70 + 2 x âge ». Entre 1 mois et 2 ans, la fréquence cardiaque est d’environ 130 bpm (100 bpm à partir de 5 ans, 70 bpm à 14 ans). C’est très bien d’y penser, c’est mieux de le mettre à tord que l’inverse, mais surtout ne vous contentez pas de ça avec si peu d’arguments.

J’ai vu des manques de logique, où on sentait que l’étudiant cherchait à mettre le SHU en question 6, un peu parce que « c’est le gros diagnostic qui doit apparaître à la fin » :

  • « GEA à E. coli entéro-toxinogène avec hémolyse » (là, c’était peut-être un oubli du nom du syndrome, ça m’arrivait au moins sur un dossier sur 9 à chaque session d’ECN blanches…)
  • « GEA et déshydratation légère à rotavirus », avec une justification (non demandée) qui oublie de mentionner l’ictère… alors qu’à la question 2, la réponse donnée était « pas d’antibiothérapie car risque de SHU devant l’ictère » !
  • « Déshydratation extracellulaire sur GEA avec origine bactérienne, de cause la plus fréquente rotavirus »
  • « GEA virale de l’enfant avec déshydratation aiguë sévère à rotavirus » (mais qui est ensuite hospitalisé en réanimation pédiatrique pour « insuffisance rénale aiguë sur micro-angiopathie thrombotique sur E. coli sur syndrome hémolytique et urémique »)

J’ai vu également des fautes d’orthographe ou de mauvais développement d’un acronyme :

  • « Syndrome hémolytico-urémique »,
  • « Syndrome hémolytique et anémique » (le fameux SHA ?) et plus loin, la « toxi-infection alimentaire commune » (en même temps, c’est le seul qui a pensé à calculer le déficit sodé selon 0,6 x poids x (140 – Na) pour remplir, une fausse bonne idée, vu que ça ne peut pas vraiment être coté sans être demandé expressément…)
  • « E. coli OH 117 », « O157H. » (ce dernier caractère c’est un 7 en tout petit minuscule que tu crois avoir vu 7 si c’est ça et si c’est pas ça, tu crois que c’est un coup de crayon en trop, une rature inopinée, non non je connais bien le nom de la bactérie), « OH157 » (il l’avait mis entre parenthèses), « O157NH », « O127H7 », « O101 », « E318 », « O:H117 », « 1507 OH », « OE 117H », « OE7175 »
  • « Eschirecia coli », « Escherishia » au lieu d’Escherichia… Bon, j’ai coté quand même. Surtout que beaucoup maîtrisaient super bien le latin.

Au passage, le fameux E. coli dont on parle, c’est un Escherichia coli entéro-hémorragique (ECEH) et non pas E. coli entéro-toxinogène (ECET), même s’il sécrète une vérotoxine (d’ailleurs souvent non citée : essayez de vous demander « pourquoi ? » à chaque question diagnostique, jusqu’à ce que vous ne trouviez plus d’explication : ici « SHU par E. coli car il sécrète une toxine », ailleurs ça pourra être « toxoplasme car VIH stade SIDA »…).
Petit paragraphe physiopathologique, parce que vous le valez bien…
ECET, c’est la bactérie de la turista, une diarrhée aqueuse due à la surexpression des canaux CFTR, secondaire à l’activation d’une protéine Gs – le truc pseudo-amusant de biologie cellulaire de PCEM1 ou PACES. Les canaux CFTR surexprimés entraînent la fuite de Cl- et la non-réabsorption de Na+ (donc NaCl et H2O restent dans la lumière intestinale et s’évacuent par… vous avez compris). A noter que si le gène CFTR est inactivé par une mutation (souvent en delta-F508), la fuite de chlore en extracellulaire ne se fait plus par les canaux CFTR, et du coup le mucus des cellules glandulaires n’est pas bien hydraté (Cl- se déplace avec Na+ qui entraîne son cortège de 17 H2O), et le mucus reste visqueux… C’est la mucoviscidose.
ECEH, c’est la bactérie du syndrome hémolytique et urémique. Elle sécrète des shiga-toxines ou toxines Shiga-like (similaires à celles sécrétées par Shigella, aussi responsable de SHU) ou également appelées vérotoxines (parce qu’elles sont toxiques sur des cultures de cellules de rein de singe vert d’Afrique, nommées cellules Vero… ça ne s’invente pas). Après avoir traversé la barrière intestinale, la toxine se fixe sur les cellules endothéliales (micro-angiopathie thrombotique) intestinales, rénales et cérébrales. Dans le cas clinique, vous avez les trois : la diarrhée, l’insuffisance rénale aiguë, la convulsion.

Enfin, sur 90 copies, 55 gagnent 5 points en mentionnant le Sydrome Hémolytique et Urémique à la question 3 (moyenne des 55 copies : 56,3 +/- 8,7, avec des extrêmes entre 31 et 73), 27 ont vu le diagnostic mais l’ont mis à la question 6 (moyenne des 27 copies : 41,7 +/- 9,7, avec des extrêmes entre 23 et 57), 1 l’a cité uniquement en question 7a et a 25/100. Enfin, 7 personnes seulement sont passés à côté du diagnostic (moyenne : 35,9 +/- 10,7, avec des extrêmes entre 19 et 51 !) Hum… 55 + 27 + 1 + 7, 90 copies, ouf le compte est bon ! 😀
Les chiffres, c’est rigolo, mais qu’en retient-on en pratique ? Si le cas n’est pas fougueusement discriminant en lui-même, cette question l’est pour les 27 personnes qui ont le bon diagnostic mais qui ne le mettent pas au bon endroit, puisqu’ils se voient perdre en moyenne 15 points par rapport à ceux qui ont finalement compris la même chose mais ont répondu dans le sens attendu. Donc… On n’hésite pas à répéter le diagnostic.
J’ai vu une copie qui mettait en question 3a « SHU sur TIAC », et en question 3b « TIAC sur Escherichia coli ». C’est très bien : j’ai eu le même problème en faisant le cas, et j’aurais sûrement fait pareil (c’était placer la TIAC qui me posait plus problème que placer l’infection à E. coli…) Ajoutez à ça le fait qu’en tant que correcteur, je n’ai pas hésité à mettre les points à un candidat qui répondait « échec thérapeutique d’une suspicion de GEA virale : syndrome occlusif aigu grêlique probable par strangulation compliquant une probable invagination intestinale aiguë probablement secondaire à un SHU« , et vous obtiendrez la conclusion suivante : on n’hésite pas à répéter le diagnostic quand on n’est pas limité (c’est différent s’ils précisent « une seule réponse »).
Les 27 personnes qui ont capté qu’on parlait d’un dossier de SHU auraient donc dû mettre à la question 3 : « diarrhée aiguë avec déshydratation par GEA compliqué d’un SHU par infection à E. coli dans le cadre d’une TIAC » ou un truc un peu tordu similaire… 

 

Vous venez de passer longtemps à lire. Pensez à faire une pause pour reposer vos yeux, sur notre aire de repos visuel.

Aire de repos visuel. Vous êtes en mon pouvoir. Vous partagez ce blog avec vos amis.

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La question 4...

  • Le plus oublié a été la sérologie anti-LPS (vu une seule fois, la personne a eu 48/100 – comme quoi, mieux vaut ne pas dire de bêtise, plutôt que d’essayer de briller).
  • Ensuite il est amusant de noter que la coproculture a été moins citée que les schizocytes. Je soupçonne de plus en plus qu’il y ait eu un cas similaire récemment pour les Lillois ! J’ai trouvé étrange d’oublier la coproculture (ou « coproculture à envisager »…) mais de demander des « hémocultures, BU/ECBU, examen parasitologique des selles, radiographie de thorax »… Là l’enfant est fébrile, devient doucement inquiétant (insuffisance rénale, anémie, thrombopénie, syndrome inflammatoire), et le seul point d’appel, c’est une diarrhée qui persiste. Eh bien, plutôt que d’envoyer du sang ou des urines au labo, autant leur envoyer du caca, non ? Désolé, là je ne vois pas trop comment aider ceux qui auraient pu l’oublier. Noter au passage qu’il n’y a pas d’examen systématique à faire chez un enfant fébrile au-delà de trois mois (donc pas de radiographie de thorax sans signes respiratoires).
  • Dans la catégorie des examens illimités, la « sérologie VIH » (sûrement pour la bicytopénie), la « recherche de Clostridium difficile » (ou « recherche des toxines A et B d’E. coli », beau mélange :D), la « rectosigmoïdoscopie avec anatomopathologie » (un peu tôt dans la démarche diagnostique), le « gaz du sang artériel et radio de thorax à la recherche d’un SDRA », le « fond d’œil » (pour la thrombopénie, avant l’avènement du scanner surtout), la « calcémie » (pour les diarrhées ?), la « lactate », et le « discuter un bilan de thrombophilie »… Tout ça n’a pas lieu d’être. Restons simple et cohérent avec la clinique, s’il n’a pas de dyspnée, il n’a pas de Syndrome de Détresse Respiratoire Aigu… Même si on se fiche de l’impression qu’on laisse au correcteur, le but du « jeu » c’est quand même de ne pas demander n’importe quoi quand vous serez interne ou médecin.
  • Beaucoup sont systématiques et veulent vérifier la thrombopénie sur un tube à l’EDTA. C’est honorable, même si à 70 G/l, ça ne devrait pas changer grand-chose. De même, la procalcitonine revient souvent dans les examens demandés, et je pense que ce n’est pas mal d’y avoir pensé (plutôt pour les fièvres récentes et méningites).
  • L’ASP devrait valoir des points négatifs, voire un zéro à la question. Les recommandations sont claires : il faut arrêter d’irradier à tord et à travers (on fait un ASP pour une inhalation de corps étranger, une occlusion, une perforation ou une poussée de MICI, sinon c’est toujours l’échographie qui prévaut chez l’enfant et le scanner chez l’adulte).
  • Il est quand même plus pertinent de penser au bilan pré-transfusionnel en le détaillant (c’est court d’écrire Groupe Rhésus RAI et c’est souvent ce qui est coté), quand l’hémoglobinémie est basse à 9,5 g/dl (pour rappel, les taux normaux sont de 14 à 20 g/dl à la naissance puis chutent jusqu’à 9-14 entre 2 et 6 mois, avant de remonter jusqu’aux taux normaux de 11,5-14 à partir de 2 ans ; ensuite, les hommes adultes ont un taux attendu supérieur entre 13-17 g/dl par augmentation de la production de l’hémoglobine par la testostérone, les femmes ont quant à elles une hémoglobinémie entre 12 et 16 g/dl).

Enfin, parce que j’ai trouvé ça amusant mais qu’il faut éviter, au cas où ça serait pris pour un signe discriminant, un étudiant a écrit : « formule leucocytaire ah non on l’a ». Et n’arrêtez pas les antibiotiques après avoir dit à la question 2 qu’il ne fallait pas en mettre, on a l’impression que vous essayez de jouer sur tous les tableaux !

 

A la lecture des copies, la question 5 a dû être particulièrement anxiogène :

  • C’est un peu un travers qu’on apprend en conférence, de répondre de façon systématique à un type de question donné. On a vu plus haut que la méthodologie pouvait rapporter un maximum de points (4 points de surveillance à la Q1), mais là elle a souvent fait perdre du temps car pas mal d’étudiants ont voulu être exhaustifs en proposant une prise en charge diagnostique clinique et paraclinique, puis une prise en charge thérapeutique. Mais la question 3 vous fait poser le diagnostic sur la clinique, et la question 4 vous fait compléter le bilan paraclinique. Il faut donc voir le cas comme un ensemble, une succession de paragraphes qui amènent quelque part, et comprendre iqu’onze le rédacteur du dossier n’attend qu’une démarche thérapeutique…
  • … parce que du coup, l’étudiant qui a mis Groupe Rhésus RAI à cette question sans penser à la remettre à la précédente a perdu du temps et des points…
  • … et l’étudiant qui s’est contenté de mettre pour la partie thérapeutique « traitement symptomatique, traitement étiologique, mesures associées : soutien psychologique, accord des parents, information » n’a pas pu avoir de points.
  • Ne confondez pas remplissage, réhydratation, rééquilibration hydroélectrolytique (ou même une réhydratation hydroélectrolytique, très joli pléonasme dans une copie très réussie ;-)). On remplit par du sérum salé isotonique le secteur extracellulaire en cas d’hypovolémie (ici on a infirmé la tachycardie – premier signe – et l’hypotension artérielle – signe tardif de choc), on réhydrate par du sérum glucosé le secteur intracellulaire (car les cellules utilisent le glucose et ne laissent que l’eau), et on fait une rééquilibration hydroélectrolytique quand on ajuste les ions en fonction du ionogramme sanguin (c’est plutôt ce qu’on fait en pratique). Ne parlez de remplissage qu’en cas de sepsis sévère, ou de choc avec une tachycardie.
  • Ne faites pas de soupe, on ne vous en demande pas.  Jamais on ne vous demandera de dire quel soluté vous allez mettre avec quelle quantité d’ions, et pourtant 30% au moins des étudiants s’y risquent. Ça dépend du ionogramme sanguin (si vous y tenez, j’ai retrouvé dans la Revue du Praticien cette formule : solutés de 50 g/l de glucose, 1,5 g/l de KCl après reprise de la miction, 2-4 g/l de NaCl sur la base de 150 ml/kg/24h – NE PAS RETENIR !). Donc si vous écrivez « G5 + 3g NaCl + 1,5 g KCl dans 500 ml sur 8h », c’est faux et c’est risqué. Si vous écrivez « 3 g NaCl + 1g KCl dès la reprise de la miction », ça montre que vous n’êtes jamais allés dans un service de réanimation où ils se cassent souvent la tête sur volume et vitesse…
  • Comme pour la question 1, n’oubliez pas dans la surveillance une donnée qui vous est donnée dans l’énoncé qui suit. Ainsi, vous éviterez d’omettre une surveillance de la diurèse, et vous esquiverez le seul PMZ du dossier (à ce propos, j’ai trouvé la notation assez ridicule sur cette question : « diurèse horaire » et « diurèse » sont tous les deux cotés.)
  • La surveillance type « déshydratation, respiratoire, hémodynamique, neurologique » ne doit pas être un tiroir ressorti à toutes les sauces. Adaptez vos connaissances au dossier !
  • Encore une fois, faites un effort d’imagination pour voir votre patient. Vous venez de l' »hospitaliser en réanimation » pour une « urgence vitale », vous voulez une « chambre à 18°C » (bonne chance) et une « surveillance de fréquence cardiaque et tension artérielle »… Qu’oubliez-vous ? Le grand tableau blanc où sont notés tous les bilans, les fi-fils qui traînent partout avec des seringues électriques qui font bip-bip, le stétho personnel de la chambre et… et… oui, le scope. Hospitaliser en réanimation sans scope, c’est un peu comme aller à MacDo pour manger une salade : ça peut se faire, mais c’est mal vu.
  • Petite pensée à celui qui a pensé à « mettre à jour le calendrier vaccinal », dans ce contexte infectieux, et pour lui d’invagination intestinale aiguë même (c’est bien, profitons qu’il souffre du bide pour lui faire des piqûres, il les sentira moins !)
  • Un seul étudiant sur 90  a pensé à mettre le mot clé « quantification des entrées-sorties ». Malheureusement, il l’a mis en question 1.

Au final, très peu de choses étaient cotées, et c’était souvent la question sur laquelle vous étiez le plus exhaustif.

 

La question 6 prolonge la question 3 :

  • Ceux qui parlaient de « déshydratation sur gastro-entérite aiguë virale » ont voulu mettre le SHU ici, parfois sans parler de l’insuffisance rénale aiguë. Certains ont mis dans leur justification (non demandée) « anémie hémolytique, diarrhée sanglante, insuffisance rénale aiguë » et ont donc eu les points… Comme quoi, même si ce n’est pas demandé, il peut être intéressant d’apporter une courte justification en mots-clés (sous réserve d’avoir du temps).
  • Le terme oligo-anurique était souvent oublié, sûrement parce que, comme moi, vous classez les insuffisances rénales aiguës en fonction de leurs étiologies (obstructive, fonctionnelle, organique dont tubulaire, interstitiel, glomérulaire et vasculaire). La question étant celle du diagnostic, essayez de penser au moyen mnémotechnique LASPECT (localisation, aiguë/chronique, sévérité, porte d’entrée, étiologie, complication, terrain). Dans une insuffisance rénale chronique, vous pensez à mentionner la sévérité en fonction de la clairance de la créatinine (attention en cas d’anurie à ne pas calculer de clairance !) ; dans les IRÄ, pensez à parler de la diurèse (conservée, oligo-anurique ou anurique). On parle d’oligo-anurie pour une diurèse en-dessous de 20 ml/h (ou entre 100 et 500 ml/24h) chez l’adulte, inférieure à 0,5 ml/kg/h chez l’enfant et 1 ml/kg/h chez le nourrisson.
  • Pour information, la cause la plus probable de l’insuffisance rénale aiguë ici est une insuffisance rénale aiguë organique par néphropathie vasculaire (atteinte endothéliale des vérotoxines). L’insuffisance rénale aiguë fonctionnelle est a priori éliminée par le fait que Jeanne soit prise en charge dans un service adapté, avec une réhydratation intra-veineuse adaptée au ionogramme depuis la veille. Il faut bien sûr réaliser une échographie pour éliminer un obstacle (mais ça serait quand même une sacrée coïncidence).
  • Si vous sentez que vous êtes parti sur une mauvaise voie, essayez de vous poser pour réfléchir. Il faut mieux perdre 10 minutes que 10 points… Ainsi, en écrivant ce qui suit, l’étudiant devait lui-même se douter qu’il n’aurait pas beaucoup de points pour sa réponse : « insuffisance rénale aiguë sur déshydratation extra-cellulaire ou pyélonéphrite aiguë ; traitement : ECG, traiter l’hyperkaliémie » ou « anémie hémolytique avec insuffisance rénale, micro-urie et thrombopénie »…
  • La « coproculture » ou « l’échographie de principe pour éliminer une obstruction » ne sont pas plus des traitements que l’ECG (et les étudiants qui ont répondu ça à la question 6b auraient dû revenir deux pages en avant pour glisser ces examens dans la question 4 !) Il faut un bon classement dans la copie si on veut un bon classement aux ECN…
  • Dans la partie thérapeutique m’a été donné de lire une grande variation d’intensité thérapeutique : « correction progressive à 1 mEq/h par restriction hydrique », « remplissage IV par SSI et antibiothérapie par C3G », « échanges plasmatiques + immunosuppresseurs + épuration extra-rénale ». Par ailleurs, la surveillance n’étant pas explicitement demandée dans l’intitulé, contrairement aux questions 1 et 5, on ne s’attend pas à la voir cotée ici (donc ne mettez rien ou contentez-vous de peu pour économiser votre temps).
  • Ne soyez pas vague, on demande des réponses tranchées. Si vous avez raison mais que vous mettez un « peut-être » devant, vous risquez de passer à côté des points (« discuter la préparation à l’épuration extra-rénale », « culots globulaires à discuter », « envisager une transfusion si mauvaise tolérance », « prise en charge de l’anémie aiguë et de la thrombopénie aiguë », « +/- épuration extra-rénale, +/- culots globulaires », « prévision de transfusion de culots »). Si vous avez tord et que c’est un Mis Zéro, votre  « discuter »/ »peut-être » ne vous sauvera pas. Bref peu de bénéfices et plein de risques à faire part au correcteur de votre hésitation.
  • Encore une fois, ceux qui se mettent dans le cas en vrai ne peuvent pas se tromper ici. Imaginez… Il est 4 heures du matin, votre DECT/TSI/téléphone agaçant vous réveille, et l’infirmière au bout du fil vous dit que la petite Jeanne hospitalisée en service de pédiatrie a une hémoglobinémie descendue à 6,5 g/dl et une créatinine quasiment triplée à 313 micromol/l.
    Réponse A : je la mets en restriction hydrique, j’attends une mauvaise tolérance de l’anémie pour transfuser, et je vais me recoucher.
    Réponse B : je demande de commander des culots globulaires, j’accours dans le service tout en appelant le néphrologue ou le réanimateur pour lui exposer le problème d’insuffisance rénale…
  • Le moyen de dialyse a été souvent oublié, et de mémoire, mentionner la dialyse péritonéale (2 ou 3 copies) avait une bonne valeur prédictive positive d’avoir une des meilleures notes…

La question 7 a été l’une des principales sources de perte de points pour quasiment tous les participants… Pourquoi :

  • Les causes possibles n’étaient pas orientées sur le cas et beaucoup n’ont pas mentionné l’hyponatrémie, ou alors à tord, en disant que c’est la correction trop rapide qui entraîne une myélinolyse centro-pontine à l’origine de la convulsion. C’est faux : comme son nom l’indique, la myélinolyse centropontine ne touche pas les hémisphères cérébraux (les signes cliniques sont ataxie, coma, hyporéflexie, dysarthrie, dysphagie, somnolence, ophtalmoplégie, tétraplégie). 
    Ainsi, dans une copie j’ai lu « hypo ou hyper-kaliémie, hypercalcémie, hypo ou hyper-glycémie », c’est-à-dire tous les troubles ioniques que Jeanne n’a pas et susceptibles de faire convulser, à l’exception de l’hyponatrémie, alors qu’elle est à 122 mmol/l.
    J’ai aussi lu dans des copies omettant l’hyponatrémie : « tumeur cérébrale », « méningite », « hyperbilirubinémie », « empyème », « ictère nucléaire », « traumatisme », « infection parasitaire », « SIADH », « lymphome », « shigellose », « salmonellose », « neuropaludisme »…
    Quitte à citer ce que la patiente n’a pas, à moins d’être sûr de soi et d’avoir de forts arguments pour, essayez au moins de bluffer en disant que l’hyponatrémie peut-être épileptogène (et puis, vous savez tous qu’hyponatrémie = hyperhydratation intracellulaire = oedème cérébral).
  • Sur la même question, évitez les erreurs de recopiage (« hypernatrémie »), ou de rester vague encore une fois (« crise convulsive métabolique », écrit par un des trois ou quatre étudiants sur 90 à avoir pensé à remettre l’épuration extra-rénale à cette question, et qui n’a eu que 25/100 au final : comme quoi, avoir des points rares n’est pas toujours bon signe…)
  • Puisqu’on est dans les raretés, je n’ai jamais vu « HTA maligne ». Evidemment, avec une tension à 100/60 aux dernières nouvelles (question 3), on ne pense pas à l’hypertension artérielle, parce qu’on réfléchit avec les chiffres d’adulte. C’est pourtant l’une trois complications de l’insuffisance rénale aiguë organique oligo-anurique (HTA menaçante, OAP, hyperkaliémie, une triade qui touche le cerveau, les poumons et le coeur, comme la traditionnelle « surveillance neurologique, respiratoire et hémodynamique » finalement). Vous pensez beaucoup plus à l’hyperkaliémie qu’aux deux autres.
  • Pour la partie thérapeutique, la réponse typique était :
    – « Observer la crise » (la question n’est pas très bien faite, mais là apparemment on arrive après 10 minutes de convulsion, et la description est déjà faite)
    – « Dextro » (ce n’est pas thérapeutique mais c’est une bonne idée d’y penser)
    – « Canule de Guédel, protection de l’environnement »
    – « Mise en condition » (déjà fait normalement), évitez de passer directement à « intubation oro-trachéale » avant même de mettre des benzodiazépines, comme je l’ai vu sur une copie
    – « Traitement symptomatique : anti-épileptique intrarectal » pour environ 70-80% des copies (INTRARECTAL, après avoir posé « 2 voies veineuses périphériques de bon calibre, un scope en réanimation » à la question 5, l’avoir « hospitalisé en réanimation avec mise en condition : voie veineuse périphérique » à la question 6) : soyez dans le cas ! J’ai également lu une fois « anti-épileptique en intra-musculaire » qui est aussi peu cohérent avec la réalité, et en plus bien plus dangereux compte tenu de la thrombopénie à 43 G/l.
    – « Traitement étiologique », avec parfois « bilan étiologique » détaillé (ce n’est pas un traitement !) Seule une poignée d’étudiants a poursuivi l’épuration extra-rénale pour corriger les causes les plus probables (hyponatrémie, HTA maligne).
    – « Surveillance » détaillée (comme pour la question précédente, vu que c’est explicitement demandé dans les questions 1 et 5, on ne s’attend pas à ce que ça soit coté ici sans être dans l’intitulé).
  • Certains étudiants pensent à « rassurer les patients »… La phrase la plus drôle était quand même « réassurance selon l’évolution » 😀

 

La question 8, je la voyais comme une aide pour orienter vers une toxi-infection alimentaire collective. Etrangement, ce terme n’a pas été souvent cité, alors qu’il y avait trois cas de diarrhée, un syndrome hémolytique et urémique (qui défraye toujours la chronique dans ce cadre de TIAC).

Quand j’ai fait cette question, j’avais répondu : « TIAC : envoi de la souche au CNR, enquête de cohorte rétrospective pour dépister les cas »… et j’avais réussi à oublier la déclaration obligatoire. Vous avez (heureusement) de meilleurs réflexes que moi et environ 50% des étudiants pensent à la déclaration. La meilleure réponse à donner et que j’ai rarement lue est « déclaration obligatoire à l’ARS par signalement nominatif et notification anonymisée ». Par contre, personne n’a mentionné le « centre national de référence des souches d’E. coli » ! C’est un autre mot clé important mal connu même si ici ça ne changeait rien, étant donné que la notation n’était pas très adaptée aux réponses qui ont été données (isolement direct et anticorps sanguins à envoyer au CNR…)

Dans le chapitre des réponses amusantes, à cette question « quelles sont les modalités de l’enquête épidémiologique » :

  • « IRM, EEG, GDS, examen complet à la recherche d’une crise d’épilepsie partielle » (épidémiologique ?!)
  • « Etude prospective ou rétrospective, cas-témoin ou cohorte », « nécessite l’accord du comité éthique » : non seulement on a bien compris que la LCA et l’épidémiologie ne vous passionnent pas, mais en plus, vous insinuez quand même de monter une étude prospective avec accord d’un comité éthique pour donner des syndromes hémolytiques et urémiques à des enfants de moins de 2 ans. Vous avez intérêt à avoir de bons contacts, et un bon avocat !
  • « Retrait et alerter les médias sur les produits incriminés » (allo TF1 ?)
  • « Surveillance en hospitalisation des enfants de moins de 8 ans ayant consommé la nourriture incriminée » (quelqu’un qui a bien compris qu’il fallait essayer de bluffer)
  • « Enquête nutritionnelle » (allo Danone ?)
  • « Déclaration au centre régional de pharmacovigilance » (pas tant que les pharmacies ne vendront pas de poulet
  • « Eduquer les cuisiniers » (c’est un raccourci pas très élégant)

 

Voila c’est fini pour ce billet de « tutorat », j’espère que ça vous a plus et que vous en retiendrez quelques notions.

Notez enfin qu’il était écrit sur le bas-de-page des copies lilloises : « lareferencehippocrate.com » (page 1) et « preuves classantes nationales » (page 2). On a déjà repassé une épreuve pour pas beaucoup plus que ça 😉

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