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Faites médecine qu’ils disaient (6/??) – Il n’y a pas de justice en médecine

Après mon échec, j’ai décidé d’être mat, et je suis donc parti bronzer sous le soleil turque de Bodrum. (Je commence avec une blague, parce que je risque de ne pas être très drôle encore dans ce billet… cette série a un côté nombriliste, plutôt amusant à écrire mais sûrement beaucoup moins à lire ; j’écris aussi pour me raviver les souvenirs, et je partage parce que c’est dans l’ère du temps, mais voilà…)

Bref, après les vacances, passées en partie sur MSN Messenger avec un ami de médecine (G.), et un de musique (Y.), la deuxième partie d’échecs a pu recommencer… Je connaissais les pièges de l’adversaire même s’il s’était renouvelé ; par exemple, cette fois ce n’était plus les biophysiciens qui s’étaient lâchés, mais les statisticiens — ne nous y trompons pas, j’ai une note parmi les meilleures, avec mon pauvre 13.5… « That’s P1 ! »

Liste d'admission... \o/ (Vous avez le droit de ne pas partir en fac de bio, ne pas devenir prof, et faire des tas de gardes en tant que sous-fifre \o/)

Liste d’admission… \o/ (Vous avez le droit de ne pas partir en fac de bio, ne pas devenir prof, et faire des tas de gardes en tant que sous-fifre \o/)

La première P1, je l’avais faite un peu plus en solitaire, avec une nouvelle amie et quelques anciens que je recroisais au gré des semaines. Je sortais peu, je venais à Lille uniquement pour les cours et rentrais aussitôt chez moi ensuite. Cette fois, j’avais surtout retrouvé G., un ami de collège (avec qui j’étais toujours en contact, surtout via MSN comme je disais) : en septembre, il avait dû quitter sa résidence universitaire (en travaux) pour rejoindre la mienne — dont je parlerai dans un des trois prochains billets, qui sera donc officiellement sous le signe du LOL.

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Faites médecine qu’ils disaient (5/??) – Ca commence !

UNE FOIS !

DEUX FOIS !

Trois fois, quatre fois, cinq fois, six fois… Cette fois, je sens bien qu’tu m’l’as mise touloutoutou, ce n’est plus ton p’tit doigt qui m’chatouilleeeuh, je sens ton nombril contre le mieeeeeen… et la chaleur de tes grosses cSTOOOO…

— …OOOP !

Quoi ? Pourquoi tu t’incrustes dans ma mémoire comme ça ?

— Mais qu’est-ce qui te prend à être aussi vulgaire, t’es devenu maboul ?

Mais non ! J’ai dit que j’allais commencer à raconter ma P1.

— J’vois pas le rapport…

Ben justement, tu devrais. Ça, c’est une des chansons du patrimoine : une paillarde qu’on chantait tous les jours, une à plusieurs fois par jour, tous ensemble en amphi 2 (celui du prof) en tapant sur les tables et le sol… Enfin, quand je dis « on », c’est surtout les carrés (ceux qui ont redoublé la première année), parce qu’il m’a bien fallu 4 mois avant de comprendre et enregistrer les paroles… Tiens, si tu veux te rappeler à ces souvenirs, il y a plusieurs vidéos sur DailyMotion, qui ont été prises à Lille…

 

— Mon Dieu… Vous n’aviez que ça à faire ?

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Faites médecine qu’ils disaient (4/??) – Entrée agitée

« SPROTCH ».

Sprotch, ce n’est pas le doux bruit d’un bisou de Saint-Valentin.

Sprotch, c’est le bruit de ma joue droite sur la porte vitrée de la faculté.

Sprotch.

J’ai souvent fait Sprotch.

Il faut dire qu’à l’époque, à la faculté de Lille, nous n’avions pas de places prédéfinies, comme c’est le cas depuis 2008 ou 2009 (6 phrases, et j’arrive déjà au point « je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître » !)

En 2004, pour avoir une place dans le meilleur amphithéâtre, nous devions arriver tôt, courir, monter des escaliers, repérer un rang stratégique, s’y installer, lancer son manteau, son sac et sa trousse pour réserver le plus de places possibles pour les amis (ça se rapproche du biathlon, remarquez). Nous étions environ 400 le matin à réserver avec difficultés des places dans l’amphithéâtre 2, capable d’accueillir 600 personnes… Sans réservations, il n’y aurait pas eu de combat quotidien ; sans réservations, il n’y aurait pas eu le même folklore ; et en même temps, tous ceux qui ont essayé d’empêcher le système de réservations se sont cassés les dents — plus ou moins littéralement.

Nous bataillions pour entrer dans l’amphithéâtre 2, ou amphi « prof » — celui où le prof était physiquement présent, où on avait une vue permanente sur tout le tableau, où il n’y avait pas de problèmes techniques isolées (plus de son, plus d’image, comme dans les amphis « vidéo » où le cours était retransmis sur écran géant). Et face à nous, il y avait un homme, seul, face à son destin… Parfois, je repense à ce gardien qui, chaque matin à 7h15, devait ouvrir les portes de la faculté… Chaque matin, en tournant la clé, il croisait le regard décidé de 400 P1 prêts à rejouer la chevauchée des Walkyries. Chaque matin, à 7h16, sa vie risquait de s’achever sous les piétinements sans concession de centaines de P1 enragés…

This is Sparta.

Tous en amphi deuuuuuuuuuuuux !

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Faites médecine qu’ils disaient (3/??) – Porte ouverte

« Bon, je suis à la bourre, mais j’ai presque fini. T’es là ? demandai-je.

— Évidemment, idiot, où veux-tu que je sois ? C’est toi qui m’a créé.

— Oh, ça va le nihilisme…

— Non, mais sans rire… Je vis dans ta tête !

— Ah oui, c’est vrai. Enfin, tu peux aussi vivre dans ma tête et être indisponible…

— Ah ? Et qu’est-ce que je pourrais bien faire ?

— J’en sais rien ! Glander dans mon épiphyse, jouer à la pétanque sous mon pont, twitter dans mon système glymphatique… Je ne tiens pas l’agenda des trucs dans ma tête.

— Bon, bon… De quoi tu vas me parler aujourd’hui ?

— De portes. Tu sais, la médecine, c’est plein de portes. Comme dans un vaudeville, ça doit être pour ça que j’ai choisi de f…

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Faites médecine qu’ils disaient (1/??) – Se raconter

« Ça fait longtemps que tu n’as pas raconté tes études de médecine sur ton blog, me faisait fort justement remarquer un ami, la semaine dernière, autour d’une bière.

— C’est vrai, répondis-je, le diabolo grenadine aux lèvres. Je ne suis plus inspiré : d’autres bloggueurs ont déjà tout dit et redit, souvent bien mieux qu’ici.

— Moi, ça m’amusait… Tu devrais en profiter, tu n’auras peut-être plus envie d’y revenir, vu que tu finis bientôt tes études.

— Plus que 9 mois 1/2 avant d’être vraiment médecin… répliquai-je machinalement, habitué à ce Point Temps Restant®.

— Une grosse grossesse, quoi.

— Ouais… Sans la prise de sang mensuelle pour la toxoplasmose, et sans prendre 10 kg… Enfin, j’espère, m’empressai-je d’ajouter en pinçant ma bedaine.

— Et après ça, tu vas continuer ?

— Non, ça m’étonnerait.

— Oh ! Tu pourrais raconter tes rapports avec les patients, comme le font ceux que tu as cité sur ta page de liens !

— C’est vrai, ils s’en sortent très bien, eux. Mais je n’y arriverai pas, moi : j’ai beaucoup de mal à écrire à propos de patients.

— Qu’est-ce que tu crains ? Qu’un patient tape ton nom sur Google, débarque ici avec son après-midi de libre, s’enquille tout ton blog, se reconnaisse (alors que tu auras changé l’âge, le nom et le sexe), et te fasse un procès parce que tu auras révélé publiquement et impudiquement que tu lui as prescrit du paracétamol ? Tu n’aurais pas viré un peu parano avec tes études ?

— Je n’ai pas peur. J’ai résisté — je crois — à la médico-légalophobie hospitalière. Et pour ta gouverne, le problème provient rarement des prescriptions…

— De toute façon, si ça se trouve, plus de personnes liront ton ordonnance à la pharmacie que sur ton blog !

— J’ai 100 lecteurs par jour, ça va bien, merci…

— Eh ben, alors pourquoi tu veux arrêter ? T’es fatigué de te replonger dans tes études ?

— Non, pas vraiment.

— Pense à tes lecteurs : tu vas briser le cœur à 80 bots russes.

— Les bots n’ont pas de cœur…

— Tu vas leur briser les bits, alors.

— C’est fin… Marrant, j’aurais dit les talons, moi.

— Carabin de pacotille ! On ne t’a rien appris à ton intégration ?

— Non. Ni au faluchage, d’ailleurs.

— Tiens, bah ça tu ne l’as pas raconté, ton faluchage.

— C’est vrai, je pourrais… Il n’y a pas grand-chose à dire, en même temps. De la farine, des oursons, du champagne en pagaille. De la couture aussi, beaucoup de couture. Remarque, au moins, il n’y a pas de patient…

— Mais qu’est-ce qui t’arrêtes avec les patients ?

— Ecrire sur un patient m’est pénible : je cherche à tout modifier, tout garder, être crédible dans ma réinvention… Quitte à faire ça, autant que je remplisse ma page de nouvelles, m’autopromouvai-je avec un joli lien URL dans la voix.

Jaddo le fait bien, elle, me rétorqua-t-il avec un œil pétillant, avant de commander une deuxième chope.

— Elle excelle, même. Pas moi.

— C’est pour ça que tu comptes fermer les portes ? D’autres font mieux… C’est un peu léger.

— Oh non, pas vraiment ! Mon site reste ouvert de toute façon… Je n’ai pas que la médecine dans la vie. Et puis mon blog, ce n’est pas que de la (quasi-)biographie.

— Ouf, tu me rassures.

— Je publierai toujours des articles en formation continue, comme ceux sur les antibiotiques ou la physiopathologie des poussées dentaires… Peut-être que je ferai encore des cas cliniques également — j’en ai une demie-douzaine encore à publier ! C’est juste que… je ne parlerai plus de mes études, ou des patients.

— Et donc, tu n’as vraiment plus rien de cocasse à dire sur tes années passées ?

— J’ai raconté des points amusants ces 2-3 dernières années. J’ai fait le tour de tout ce qui m’a marqué et dont je me souviens bien.

— Ah d’accord, c’est donc ça ! Je comprends mieux, tu as tout oublié en fait !

— Pas du tout…

— Tu as oublié ta vie d’étudiant. Tu dis que tu finis dans 10 mois, mais en fait, tu es déjà passé de l’autre côté, la fameuse « vie active », les salaires, les impôts, les frais réels, la paperasse…

— …

— Oubliés ton P1, ton P2, ton D1, ton externat, les ECN ! Encore un an ou deux, et tu expliqueras que le P1 n’était pas si dur, c’est ça ? Peut-être que tu le penses déjà depuis les ECN, non ?

— Non ! Enfin, c’est vrai que les ECN…

— Allez, ne dis pas de bêtise va. Et que raconteras-tu plus tard : que tu as travaillé d’arrache-pied tous les jours, que tu as été un étudiant modèle ou un fêtard invétéré ?

— Ni l’un ni l’autre…

— Quelles études t’inventeras-tu, Michaël ?

— Arrête, je n’inventerai rien ! Je sais à quoi j’ai passé mes dix dernières années, ça va ! J’y étais !

— Tu es sûr ? Tiens, tu te souviens de ta première suture ?

— Bien sûr ! J’avais suturé une vieille dame gentille ; ça avait été assez difficile, mais ça ne s’était pas si mal passé au final, il me semble… C’était cette garde horrible, où j’ai dormi sur la table de gynéco.

— Ce n’était pas plutôt la salle de plâtre ?

— Peut-être… Qu’est-ce que ça change ?

— Rien… C’était une question de principe à l’époque, mais ça ne change rien, tu as raison. Heureusement qu’il y a un article où tu parles de cette suture, ça t’évitera de dire dans 30 ans que tu l’avais reconstruite à l’imprimante 3D.

— Je n’oublierai pas ces premiers gestes…

— Je suis persuadé du contraire. Tu aimes bien écrire, inventer : tu vas tout réinventer. Peut-être même est-ce déjà ce que tu as fait ! Si ça se trouve, il n’y a jamais rien eu de vrai dans tout ce que tu nous as raconté… Les as-tu vraiment faites tes gardes ?

— Bien sûr, tu m’agaces à la fin !

— Je dis ça, moi… Il y a des externes qui les esquivent, tu ne serais pas le premier… Peut-être que tu n’allais ni en cours, ni en stage…

— J’y allais.

— Et si je te repose la question dans 10 ans, qu’est-ce que tu répondras ? Que tout ça, c’était « le bon vieux temps » à côté du travail, des impôts à payer, la famille à gérer, la vie, la mort…

— Non, je sais tempérer. Rien n’est tout blanc ou tout noir dans les études, comme ailleurs. Arrête de me prendre pour…

— Et tu me diras quoi, au juste ? Tes 20 articles là ? C’est tout ?

— Qu’est-ce que tu cherches ? Tu veux que je te racontes mes études en détail, c’est ça ? Tu veux que je te prouve que je n’ai pas tout oublié ? Que je te raconte comment je m’explosais la tronche sur la porte de la fac tous les matins à 7h15 pour aller dans le meilleur amphithéâtre en première année ? Tu veux que je te décrives les séances de dissections sur trois semaines et les odeurs qui vont avec, que je te parle de cette interne de dermato odieuse, de mon premier massage cardiaque réussi-raté, de mon mois d’aide soignant larbin en maison de retraite ? J’ai plein de souvenirs ! Quoi que tu en dises, j’ai fait tout ça, j’y étais. Au premier rang. Et si tu veux que je te le prouve, très bien, je vais tout te raconter.

— … très bien. Je sens que je vais m’amuser.

— Ça prendra du temps, il faudra que tu reviennes.

— Prends-le… Je serai là deux vendredis par mois. Ça me fera mes week-ends.

— Ok, alors on se revoit le vendredi 31 janvier. Je vais tout te raconter, en commençant par le début. Et crois-moi, tu ne seras pas déçu du voyage !

 

Et sur ces promesses,  mon ami imaginaire est retourné au fond de ma tête.

Hein ? Bah oui, imaginaire, bien sûr ! Que croyiez-vous ? Que j’ai des amis qui me parlent de mon blog dans la vraie vie ? 😀

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